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Sophie Dupuis : j’aime les sujets de famille

Vendredi, 9 mars 2018

Cette semaine, deux longs métrages québécois prennent l’affiche. Le premier, le documentaire Bras de fer, réalisé par les frères Jean-Laurence et Jonathan Seaborn, qui s’intéresse à la lutte citoyenne menée par Véronique Lalande et son conjoint Louis Duchesne contre les émissions de poussières de métaux lourds, aussi connues sous le nom de « poussière rouge », provenant du Port de Québec. Prix spécial du jury au Festival International du Film des Droits de l’Homme à Paris en décembre dernier. À voir au Cinéma Beaubien (Montréal) et au Cinéma Le Clap (Québec).

Le second film à sortir aujourd’hui, c’est Chien de garde, le film de clôture des RVQC. Rencontre avec la réalisatrice.

Synopsis : JP vit avec son frère Vincent, sa mère Joe et sa copine Mel dans un petit appartement de Verdun. Constamment sur la corde raide, JP tente de conserver un équilibre entre les nombreux besoins de sa famille, de qui il se sent responsable, son travail de collecteur qu’il fait avec son frère et ses fonctions dans le petit cartel de drogue de son oncle Danny qu’il considère comme un père. Tout se complique lorsque ce dernier lui demande de faire quelque chose qui dépasse largement ses limites.

Si tu devais présenter ton film à quelqu’un qui ne l’a pas vu, que dirais-tu?

C’est une réflexion autour des liens familiaux. Cet amour et ce sentiment de responsabilité qui unissent les membres d’une famille. C’est un sujet que je trouve très puissant et qui a des impacts universels. J’espère que mon film va éveiller des réflexions. Aussi, je voulais faire un film plein d’énergie sensorielle, faire vivre au spectateur une vraie expérience...

On dit souvent que les premiers films sont toujours très intimes. Dans Chien de garde, y-a-t’il beaucoup de choses de toi?

Dans mes films, je parle rarement de moi. Dans Chien de garde, ce qu’il y a de moi, c’est mon intérêt pour les sujets de famille. C’est quelque chose qui revient tout le temps et qui finit toujours par s’immiscer dans mes scénarios. La relation fraternelle m’a toujours fasciné. Il y a un lien très puissant qui unit les familles et qui m’intéresse d’explorer.

Pourtant ta famille, elle a des problèmes. Qu’est-ce qui a fait que tu voulais parler d’une famille aussi fragile?

Pour qu’on ait la fin, il fallait que JP soit poussé très loin dans ses retranchements. Donc, je devais enfiler les responsabilités sur ses épaules. Je voulais qu’il soit sur le point d’exploser. Aussi, c’était important pour moi de parler d’amour. Les liens qu’il a avec sa famille sont vraiment des liens d’amour inexplicable. On ne choisit pas les membres de notre famille, mais on les aime. Je voulais parler de ça malgré tous ses problèmes.

En effet, on sent beaucoup une déchirure chez lui…

Oui. Ces gens-là s’aiment malgré tous leurs défauts, leurs problèmes. Je voulais parler de cette puissance des liens familiaux, dans un contexte de relation toxique et malsaine.

Comment as-tu travaillé avec tes comédiens pour les faire entrer dans la peau des personnages?

Une grosse étape de début de direction d’acteurs c’est le casting. J’ai vu énormément de monde, et finalement j’ai choisi des gens avec qui je sentais que l’on  pouvait pousser le travail très loin. La direction d’acteurs c’est ce qui m’intéresse le plus. Mon producteur me connaissait déjà,  il savait ma démarche qui est de faire énormément de répétitions. On a eu cinq semaines de répétitions. C’est énorme. Le but c’est de s’approprier le personnage. Ce que l’on fait comme scène, ca n’a pas vraiment d’importance rendu au tournage. Ce qu’il y a d’important ce sont les discussions que l’on a entre nous et qui permettent de créer les liens, les raisons de ses gestes, tout doit être expliqué. Il est arrivé que Théodore Pellerin m’appelle tard le soir pour me préciser quelque chose ou pour me dire qu’il avait compris pourquoi telle ou telle affaire. Si on n’avait pas fait ce travail en amont on serait arrivé en plein tournage avec encore des questions. Je voulais que l’on arrive sur le plateau avec des personnages super solides. Et ça a fonctionné!

Ça a du simplifier grandement le tournage...

Oui, en effet. Et il y a eu aussi des scènes qu’on a avait toutes faites en répétition et que l’on a remises en question, parce que le personnage avait évolué à travers toutes les répétitions. J’ai toujours fait ça avec mes courts. Je ne sais pas comment tourner autrement. Je pense que ça a été très apprécié des acteurs. À suivre pour voir si on va avoir la possibilité de travailler tout le temps comme ça parce que ça coûte de l’argent… c’est un choix de production. Et en plus ça fait des personnages forts.

En parlant du personnage, parle-moi un peu de celui de la mère…

La mère c’est le personnage qui me touche le plus, encore aujourd’hui parce que je la trouve belle dans sa vulnérabilité. Et aussi parce que même si elle est très bien intentionné elle manque d’outils pour faire face à la situation. J’avais envie de parler, sans jugement, de cette faiblesse, mais aussi de son côté touchant. On développe un peu de déception envers son personnage. La boisson, comment elle délaisse ses garçons…  c’est hors de son contrôle. Je ne crois pas que ces  gens n’on pas forcément le réflexe de demander de l’aide. Il y a quelque chose de plus grand que nous. Les gens ne savent pas toujours comment réagir. Elle n’a pas cette compréhension-là. Elle manque d’outils.

Pour un premier film, c’est un sujet difficile, non?

Je n’avais pas cette impression. Ça s’est fait instinctivement. Le sujet est quand même connu. Faillir [court métrage dans lequel, NDLR] était beaucoup plus risqué. J’étais bien entourée, je me sentais à l’aise. Aborder un long métrage, ça ne m’a pas paru si différent ou plus difficile qu’un court. Pour moi, c’est la même machine, mais juste un peu plus grosse. Je me suis senti très à l’aise et très confortable. En plus, le tournage s’est très bien passé. On n’a pas rencontré de problèmes, ou à peine. J’avais tout l’espace de création dont j’avais besoin.

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